[Fable] Le Rat et l'Huître
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[Fable] Le Rat et l'Huître
Titre: Le Rat et l'Huître
Auteur: Jean de la Fontaine
Parution: 1678
En lecture libre, ainsi que toutes ses Fables sur Internet (par exemple en consultant ce site dédié à l'auteur). Il existe aussi de nombreux recueils dans le commerce.
Piste de lecture: Pour La Fontaine, le rat est l'exemple même de la représentation du peuple. Ce petit fouineur est parfait pour la représentation qu'il souhaite faire de la France de son époque. Organisé en société, rusé et intelligent mais prudent, le rat est un parfait miroir de l'humain tout en sachant se distancier des situations dans lesquelles il se met (ce qui donne l'effet comique et moralisateur).
Dans 'Le Rat et l'Huître', l'auteur propose une vision d'un rat proche de l'homme, ni totalement héroïque, ni victime des circonstances. A avoir jugé trop facilement le faible mollusque, il se retrouve coinçé par ce dernier.
Le Rat et l'Huître
Un Rat hôte d'un champ, Rat de peu de cervelle,
Des Lares paternels un jour se trouva sou.
Il laisse là le champ, le grain, et la javelle,
Va courir le pays, abandonne son trou.
Sitôt qu'il fut hors de la case,
Que le monde, dit-il, est grand et spacieux !
Voilà les Apennins, et voici le Caucase :
La moindre taupinée était mont à ses yeux.
Au bout de quelques jours le voyageur arrive
En un certain canton où Thétys sur la rive
Avait laissé mainte Huître ; et notre Rat d'abord
Crut voir en les voyant des vaisseaux de haut bord.
Certes, dit-il, mon père était un pauvre sire :
Il n'osait voyager, craintif au dernier point :
Pour moi, j'ai déjà vu le maritime empire :
J'ai passé les déserts, mais nous n'y bûmes point.
D'un certain magister le Rat tenait ces choses,
Et les disait à travers champs ;
N'étant pas de ces Rats qui les livres rongeants
Se font savants jusques aux dents.
Parmi tant d'Huîtres toutes closes,
Une s'était ouverte, et bâillant au Soleil,
Par un doux Zéphir réjouie,
Humait l'air, respirait, était épanouie,
Blanche, grasse, et d'un goût, à la voir, nonpareil.
D'aussi loin que le Rat voir cette Huître qui bâille :
Qu'aperçois-je ? dit-il, c'est quelque victuaille ;
Et, si je ne me trompe à la couleur du mets,
Je dois faire aujourd'hui bonne chère, ou jamais.
Là-dessus maître Rat plein de belle espérance,
Approche de l'écaille, allonge un peu le cou,
Se sent pris comme aux lacs ; car l'Huître tout d'un coup
Se referme, et voilà ce que fait l'ignorance.
Cette Fable contient plus d'un enseignement.
Nous y voyons premièrement :
Que ceux qui n'ont du monde aucune expérience
Sont aux moindres objets frappés d'étonnement :
Et puis nous y pouvons apprendre,
Que tel est pris qui croyait prendre.
Jean de la Fontaine
Auteur: Jean de la Fontaine
Parution: 1678
En lecture libre, ainsi que toutes ses Fables sur Internet (par exemple en consultant ce site dédié à l'auteur). Il existe aussi de nombreux recueils dans le commerce.
Piste de lecture: Pour La Fontaine, le rat est l'exemple même de la représentation du peuple. Ce petit fouineur est parfait pour la représentation qu'il souhaite faire de la France de son époque. Organisé en société, rusé et intelligent mais prudent, le rat est un parfait miroir de l'humain tout en sachant se distancier des situations dans lesquelles il se met (ce qui donne l'effet comique et moralisateur).
Dans 'Le Rat et l'Huître', l'auteur propose une vision d'un rat proche de l'homme, ni totalement héroïque, ni victime des circonstances. A avoir jugé trop facilement le faible mollusque, il se retrouve coinçé par ce dernier.
Le Rat et l'Huître
Un Rat hôte d'un champ, Rat de peu de cervelle,
Des Lares paternels un jour se trouva sou.
Il laisse là le champ, le grain, et la javelle,
Va courir le pays, abandonne son trou.
Sitôt qu'il fut hors de la case,
Que le monde, dit-il, est grand et spacieux !
Voilà les Apennins, et voici le Caucase :
La moindre taupinée était mont à ses yeux.
Au bout de quelques jours le voyageur arrive
En un certain canton où Thétys sur la rive
Avait laissé mainte Huître ; et notre Rat d'abord
Crut voir en les voyant des vaisseaux de haut bord.
Certes, dit-il, mon père était un pauvre sire :
Il n'osait voyager, craintif au dernier point :
Pour moi, j'ai déjà vu le maritime empire :
J'ai passé les déserts, mais nous n'y bûmes point.
D'un certain magister le Rat tenait ces choses,
Et les disait à travers champs ;
N'étant pas de ces Rats qui les livres rongeants
Se font savants jusques aux dents.
Parmi tant d'Huîtres toutes closes,
Une s'était ouverte, et bâillant au Soleil,
Par un doux Zéphir réjouie,
Humait l'air, respirait, était épanouie,
Blanche, grasse, et d'un goût, à la voir, nonpareil.
D'aussi loin que le Rat voir cette Huître qui bâille :
Qu'aperçois-je ? dit-il, c'est quelque victuaille ;
Et, si je ne me trompe à la couleur du mets,
Je dois faire aujourd'hui bonne chère, ou jamais.
Là-dessus maître Rat plein de belle espérance,
Approche de l'écaille, allonge un peu le cou,
Se sent pris comme aux lacs ; car l'Huître tout d'un coup
Se referme, et voilà ce que fait l'ignorance.
Cette Fable contient plus d'un enseignement.
Nous y voyons premièrement :
Que ceux qui n'ont du monde aucune expérience
Sont aux moindres objets frappés d'étonnement :
Et puis nous y pouvons apprendre,
Que tel est pris qui croyait prendre.
Jean de la Fontaine
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